jeudi 10 décembre 2015

Laissez Passer les Rêves *



Il y a une quinzaine d’années, je regarde par hasard la TV un dimanche après midi : sur l’écran, Patrick Poivre d’Arvor conduit un entretien avec une religieuse à l’intérieur d’un monastère. La personne paraît avoir 55 ans, s’exprime avec des gestes amples, tutoie le journaliste, sourit fréquemment, rit franchement. Elle est ouverte, bavarde même, spontanée. Et je suis scotchée par son charisme et son aisance. 

PPDA la questionne sur sa vocation et elle raconte qu’à 20 ans, elle était très amoureuse d’un garçon qui a dû partir à la guerre (en Indochine ou en Algérie, je ne me souviens plus). Ses sentiments profonds étaient réciproques. Quand elle apprend le décès de son fiancé, elle est submergée par le chagrin et se réfugie dans la prière. D’où sans doute, son choix de vie.

A la compassion du journaliste, la religieuse répond : « Ah, mais je ne suis plus malheureuse, parce que je le vois régulièrement. Il me rend visite souvent ». PPDA, à peine surpris (on devine qu’il savait qu’elle allait en parler) poursuit la conversation sans renchérir. Et moi, d’emblée, je la crois. Parce que je trouve l’histoire jolie (on aime tous le merveilleux) et aussi parce qu’elle apparait comme une femme bien dans son corps. Je dirai, d’une façon surannée, qu’elle donne l’impression d’être honorée fréquemment dans les règles de l’art. Toutefois, je ne parle à personne de ma foi en ce vieux rêve inavoué qui habite probablement chacun de nous : survivre à notre propre mort.

Il y a trois ou quatre ans, je m’abonne pendant une année à la revue « Prier » où chaque mois, une jeune journaliste tient une chronique. Un jour, elle évoque son histoire d’amour : après quelques mois de mariage, son jeune mari trouve la mort en montagne. On comprend qu’ils se vouaient des sentiments très profonds conçus à l’adolescence. Elle décrit son chagrin qu’elle croit insurmontable dans un premier temps, puis elle explique que son compagnon est parti en précurseur et que grâce à lui, elle a connu l’expérience du mont Tabor. Curieusement, le mois suivant, elle fait l’éloge de la nudité. Si je n’avais pas écouté auparavant le témoignage de la religieuse, peut-être que je n’aurais pas eu la même lecture, je n’aurais pas cherché à décrypter entre les lignes. A tort ou à raison, je me dis que peut-être, elle aussi retrouve régulièrement son mari.

Quelques mois plus tard, Youssef, médium de son état et de ce fait très informé, confirme que ces rencontres entre deux êtres qui s’aimaient profondément, mais séparés trop tôt, existeraient bel et bien. Il me dit aussi que les églises en auraient connaissance, mais ne communiqueraient pas sur le sujet. Et le phénomène, on le devine, serait rarissime.




* Titre de la chanson de Michel Berger



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