En 1935 à Casablanca, vit un
jeune Rabbin, veuf, qui a deux enfants, un garçon et une fille âgés de dix et
douze ans. Accompagné seulement de son frère, il part à dos de chameaux faire
un périple dans le désert. A la tombée de la nuit, les deux hommes dressent
leur tente dans les dunes ou s’arrêtent chez les habitants des oasis. Ils se
rapprochent aussi des nomades qu’ils croisent non loin des sources. C’est ainsi
que le Chef d’une tribu leur offre l’hospitalité. Et il se crée des liens
d’amitié si forts et si profonds, que le Berbère, grand sage devant l’Eternel,
propose sa fille au Rabbin. Un mariage est célébré suivant les rites du Coran, puis
on imagine le retour de la petite caravane, avec, sur le chameau, la jeune
musulmane –quinze ans- dans les bras de son mari, Juif.
Les qualités humaines de ce
dernier le conduit à n’autoriser la maternité de la jeune femme que huit ans
plus tard, laquelle, entretemps, se convertit au judaïsme. Puis naît une petite
fille, Leïla, choyée et adorée par sa mère surtout, mais aussi par son père et
ses demi-frères et sœurs. Elle fréquente l’école rabbinique dirigée par le
rabbin lui-même dans la grande maison de style colonial français où elle vit
avec sa famille. Ce qui permet à Leïla, aux heures de récréation, de traverser
le couloir pour courir jouer avec son frère cadet, Georges-Youssef. Elle aime
le jardin luxuriant, la lumière blanche du soleil, et la calme pénombre de la
demeure protégée par les volets clos aux heures les plus chaudes.
Si Leïla reçoit tout l’amour et
la tendresse de sa mère –Dieu sait si les mères maghrébines savent s’occuper de
leurs enfants- il n’en est pas de même pour Youssef. Alors Leïla, du haut de
ses quatre ans, pallie son manque d’attentions, et un attachement mutuel
intense relie les deux enfants.
Dans les années 1930, les
autorités françaises n’ont pas encore introduit au Maroc le vaccin de la
variole. Youssef contracte la maladie à laquelle il survit, fort heureusement.
Mais le frère et la sœur dorment ensemble sur des tapis à la mode des berbères
du désert, et Georges-Youssef contamine Leïla qui s’alite pendant une semaine.
Elle a huit ans quand elle succombe à la maladie.
Tandis que son frère et sa sœur
aînés partent vivre en Israël, Youssef, quelques années plus tard, se rapproche
de la communauté Indoue de Casablanca, avant de partir en Europe poursuivre ses
études.
En 2005, Youssef, André et Philippe, coiffés
chacun de leur Kipa, assistent à l’office de la synagogue de Casablanca, puis
se rendent ensuite au cimetière juif. Sur la pierre tombale de Leïla est gravé
son prénom français : Clarisse.

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